L'empathie n'est pas un trait figé, car elle se révèle malléable chez les adultes, influencée par l'observation des réactions empathiques des autres.
L’étude intitulée The social transmission of empathy relies on observational reinforcement learning, a utilisé la modélisation informatique et l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf) pour démontrer comment les niveaux d'empathie s'ajustent dans le cerveau des adultes en fonction de l'environnement social.
Ce qu’il faut retenir de cette étude :
1) Les adultes peuvent apprendre à augmenter ou à diminuer leurs réponses empathiques en observant les autres, ce qui remet en question l'idée que l'empathie est un trait statique.
2) Les changements dans l'empathie sont liés à une modification de l'activité cérébrale dans l'insula antérieure, une région clé pour le traitement de l'empathie, ce qui met en évidence la base neuronale de la transmission sociale de l'empathie.
3) L'étude souligne l'importance de favoriser des environnements empathiques, suggérant que l'empathie peut être cultivée et qu'elle est cruciale pour un travail d'équipe efficace et des interactions avec les clients.
Les dernières évaluations des capacités d'empathie réalisées par le professeur Grit Hein remettent une fois de plus en question le vieil adage selon lequel "on ne peut pas apprendre de nouveaux tours à un vieux chien". Il semble que non seulement les enfants, mais aussi les adultes, peuvent adopter les réponses empathiques de leurs proches soignants en plus de leurs prédispositions génétiques. Les adultes aussi sont malléables et peuvent apprendre à être plus ou moins compatissants en observant les autres.
Le professeur de neurosciences sociales translationnelles du Centre de santé mentale de l'hôpital universitaire de Würzburg (UKW) a réussi à saisir ce phénomène social complexe au moyen de modèles mathématiques, une procédure connue sous le nom de modélisation computationnelle, et l'a cartographié dans le cerveau adulte à l'aide de l'imagerie par résonance magnétique fonctionnelle (IRMf).
Ses conclusions apportent un mécanisme informatique et neuronal de la transmission sociale de l'empathie, expliquant les changements dans les réponses empathiques individuelles dans des environnements sociaux empathiques et non empathiques. Grit Hein a, en quelque sorte, formalisé le processus de transmission de l'empathie.
La transmission sociale de l'empathie a été testée dans diverses études. La question centrale de la recherche de Hein était de savoir si l'empathie, ou l'absence d'empathie, pour la douleur d'une autre personne se transmet socialement. Dans quatre études au total, les participants ont d'abord regardé des vidéos de mains recevant une stimulation douloureuse et ont indiqué leurs propres sentiments au cours de cette expérience sur une échelle d'évaluation.
Après avoir donné leur propre évaluation, ils ont vu les réponses empathiques ou non empathiques d'autres personnes aux mêmes vidéos. Enfin, les participants ont à nouveau évalué leur empathie, cette fois par rapport à la douleur d'une nouvelle personne. Grâce à ce dispositif expérimental, Grit Hein et son équipe ont pu tester si et comment l'empathie d'une personne change en présence de pairs empathiques et non empathiques.
La transmission de l'empathie repose sur l'apprentissage par observation et renforcement
En observant les réactions empathiques des autres, les participants ont appris à être plus ou moins empathiques. "L'évaluation de l'empathie augmente ou diminue selon que l'on observe des réactions empathiques ou non empathiques. Il est intéressant de noter que la réponse neuronale à la douleur d'une autre personne a également changé", explique Grit Hein.
Les changements neuronaux mesurés dans le scanner IRMf se sont traduits par une modification de la connectivité de l'insula antérieure, une région du cerveau associée au traitement de l'empathie. Les recherches de Grit Hein et de son équipe démontrent que ces changements neuronaux peuvent être expliqués par des modèles d'apprentissage mathématique.
Cela implique que l'augmentation ou la diminution de l'empathie soit réellement induite par l'apprentissage des autres et pas simplement par une imitation ou une manifestation dans le but de plaire aux autres.
Investir dans un environnement empathique vaut la peine dans un contexte professionnel. Cela signifie-t-il que ceux qui souhaitent avoir une bonne équipe doivent créer un environnement propice ? "Absolument", répond Grit Hein. "Il est essentiel de comprendre que les adultes peuvent apprendre ou désapprendre l'empathie par l'observation, même de la part de personnes qu'ils ne connaissent pas.
Par conséquent, ceux qui créent un environnement de travail dépourvu d'empathie pour des raisons d'économies, de contraintes de temps ou de mauvaise gestion doivent être conscients qu'un tel comportement façonne de façon prolongée les comportements des employés et, à son tour, affecte leurs interactions avec les clients ou les patients.
Des études antérieures ont montré que l'empathie positive peut se transformer en motivation prosociale, augmentant la coopération et la volonté d'aider. Cependant, une empathie excessive peut également conduire à une autre voie, induisant du stress et pouvant aboutir à un épuisement professionnel ou à un retrait complet. En outre, l'empathie peut être perçue comme exigeante.
Le respect est le terreau de l'empathie
"La bonne nouvelle concernant les résultats de nos études est que nous disposons des moyens de façonner la capacité d'empathie chez les adultes par des mesures appropriées dans les deux sens", déclare Grit Hein. "Il est possible d'apprendre l'empathie positive des autres. Toutefois, pour que l'empathie se développe à long terme, elle nécessite une atmosphère de respect mutuel. On peut respecter quelqu'un sans avoir d'empathie pour lui, mais il est difficile de développer l'empathie si l'autre personne n'est pas respectée en tant qu'être humain ou si le manque de respect est accepté dans la société."
Les interactions sociales complexes sont l'un des axes de recherche de Grit Hein. Pour comprendre ces interactions, il est nécessaire de partir de la base, d'établir les mécanismes fondamentaux et d'incorporer progressivement les facteurs sociaux comme des pièces de puzzle. C'est pourquoi l'étude actuelle a été menée exclusivement auprès de femmes.
Cependant, l'effet de transmission de l'empathie sociale a été reproduit dans différents environnements (IRM et laboratoire) et avec des participantes d'âges et d'ethnies variés. Les participantes européennes et asiatiques, jeunes ou plus âgées, ont réagi de la même manière.
Les études ultérieures sur l'empathie qui incluent des participants de sexe différent représentent une approche intéressante. Pour l'instant, Grit Hein examine si le modèle peut également être appliqué à d'autres comportements sociaux, tels que l'égoïsme ou l'agression.
Commentaires pour les coachs de santé
L’empathie ne s’apprend pas, car c’est une énergie archétypale, présente chez chaque humain à la naissance. Selon Stephen Gilligan, les trois énergies archétypales sont la force (férocité, détermination), la douceur (compassion, ouverture d'esprit, gentillesse) et l'humour (flexibilité, légèreté, créativité). Pour que ces énergies puissent s’humaniser, c’est-à-dire exister dans le monde et se transformer en qualités ou capacités, elles doivent être parrainée, c’est-à-dire « accueillie et bénie », de façon précoce par une présence humaine. En l’absence de parrainage, ces énergies resteront en sommeil sous forme de potentiel.
En tant qu’adulte, nous possédons tous l’énergie de l’empathie, car c’est celle du lien. Nos croyances limitantes peuvent cependant en restreindre l’expression, même si nous observons les autres montrer de l’empathie, et même si nos neurones miroirs nous invitent à imiter l’empathie des autres. Quelques exemples de limitations : « l’empathie est un manque de responsabilité, l’empathique est une coquille vide, l’empathie est l’apanage des leaders, L’empathie c’est faire des suppositions, l’empathie est la qualité des faibles, l’empathie est passive… »
L’article insiste à juste titre sur le fait que l’expression de l’empathie nécessite une atmosphère de respect mutuel, ce qu’on pourrait aussi appeler une sécurité psychologique. De même qu’un jeune enfant a besoin, pour connaître un développement social et émotionnel normal, de développer une relation d'attachement avec au moins une personne qui prend soin de lui de façon cohérente et continue.
Dans le modèle de la Process Communication de Taïbi Kahler, l’Empathie est l’un des six types de personnalité présent, dans des proportions différentes, chez chaque humain. On considère que ces types de personnalité, en dehors de la base, se développent à partir des injonctions positives ou négatives de notre environnement. L’expression de l’Empathique peut être là aussi inhibée ou restreinte par l’intervention des autres types de personnalité.
Sources
Shaping Empathy: Adult Brains Can Learn Compassion ; Neuroscience Psychology·February 24, 2024;
The social transmission of empathy relies on observational reinforcement learning " par Grit Hein et al. Université Julius-Maximilians de Würzburg PNAS;