Accepter plutôt qu'éviter l'inconfort d'une émotion peut faciliter l'atteinte de nos objectifs et notre croissance
Pour développer de nouvelles compétences ou évoluer en tant que personne, il est souvent utile de sortir de sa zone de confort. Par exemple, si vous voulez devenir un meilleur orateur, vous devrez vous entraîner à parler devant d'autres personnes, ce qui peut probablement vous sembler gênant et inconfortable au début et aussi créer des obstacles au développement des compétences. En effet, les ressentis d'inconfort surviendront bien avant la prise de conscience d'une quelconque amélioration de vos compétences. Vous pourriez donc penser que cette expérience émotionnelle négative trop difficile à dépasser et renoncer à la réalisation de votre objectif.
Mais que se passe-t-il si nous recadrons notre attitude à l'égard de l'inconfort, en le considérant comme un signe de progrès et quelque chose à rechercher plutôt qu'à éviter ? Un nouvel article paru dans Psychological Science suggère que cette façon de penser peut motiver les individus à travailler pour atteindre leurs objectifs.
Dans la première étude, Kaitlin Woolley de l'université Cornell et Ayelet Fishbach de l'université de Chicago ont recruté 557 adultes inscrits à des ateliers d'improvisation de niveau débutant. L'exercice d'improvisation appelé "Give Focus" implique qu'un membre du groupe se déplace dans la pièce comme il le souhaite tandis que les autres restent figés sur place ; à un moment donné, l'improvisateur choisit de passer le "focus" à un autre membre du groupe, qui prend alors le relais.
Avant le début de l'exercice, la moitié des participants ont été informés que l'objectif était de "se sentir gêné et mal à l'aise", et que ces ressentis étaient le signe que l'exercice fonctionnait. Les participants du groupe témoin ont simplement reçu les instructions habituelles de l'exercice, sans aucune mention à propos de l'inconfort. Les chercheurs ont enregistré sur vidéo les improvisations, qui ont ensuite été notées en fonction de leur persistance (combien de temps les participants ont occupé le devant de la scène avant de le passer à un autre membre du groupe) et de leur prise de risque (dans quelle mesure ils ont repoussé les limites ou pris des risques pendant leur improvisation). L'équipe a constaté que les participants à qui l'on avait dit de maintenir leurs ressentis d'inconfort, passaient plus de temps à improviser et prenaient plus de risques, ce qui, selon les auteurs, montre qu'ils étaient plus motivés pendant leur tâche. Ces participants étaient également plus susceptibles de croire qu'ils avaient atteint leurs objectifs personnels pendant l'exercice.
Dans une autre étude, on a dit aux participants que l'exercice d'écriture qu'ils devaient faire, pouvait les aider à résoudre un problème émotionnel important. Certains ont été informés que le but de l'exercice était de se sentir gêné et mal à l'aise, et que ces ressentis signifiait que la tâche fonctionnait bien. Par rapport aux participants du groupe témon, les participants informés du but de l'exercice, avaient plus tendance à croire que l'exercice les avait aidés à grandir sur le plan émotionnel, à développer des capacités d'adaptation, et étaient plus motivés pour le répéter à l'avenir, par rapport à un groupe témoin.
Dans les dernières études, les participants ont été encouragés de la même manière à se sentir bouleversés ou mal à l'aise en lisant des articles sur Covid-19, la violence armée ou les opinions d'un parti politique adverse. Ces participants étaient plus motivés à s'informer sur ces sujets que les participants du groupe témoin qui ne cherchaient pas à se sentir mal à l'aise.
Les résultats des différentes études suggèrent que nous devrions rechercher les ressentis de gêne ou d'inconfort, qui sont souvent associés à la croissance personnelle, et les interpréter comme des signes de progression dans la réalisation de nos objectifs. Nous pouvons ainsi nous motiver lorsque nous sommes confrontés à des expériences considéreées comme émotionnellement négatives.
Les auteurs se demandent si l'acceptation de l'inconfort a des effets durables sur la motivation, si une personne montrera plus de perservérance pour devenir un meilleur orateur en acceptant les sentiments d'inconfort ? Seules des études à plus long terme pourront.
Commentaires pour les coachs de santé
Ce n'est donc pas l'émotion qui est négative, mais la relation que nous avons avec l'émotion. Le regard que nous portons sur les émotions détermine si elles sont positives ou négatives. Dans l'absolu toutes les émotions, qu'elles soient confortables ou inconfortables, sont positives puisqu'elles sont des messages (feedback) à propos de nos interactions avec le monde intérieur ou extérieur, et aussi ce qu'il convient de faire (feedforward) dans cette situation.
Les émotions perçues comme inconfortables (la seconde émotion) nous signalent que nous en sortons des sillons de nos habitudes de vie, nous invitent à apprendre quelque chose de nouveau et élargir notre zone de confort. C'est la raison pour laquelle la croissance personnelle implique de traverser nos émotions "inconfortables" Pour faire celà il convient de savoir accueillir la "seconde émotion" dans un état ressource.
Sources
Embracing discomfort, rather than avoiding it, can help us work towards our personal goals, 30 March 2022; By Matthew Warren; The British Medical Society ;